Danse de la divinité. Bu, le mouvement dans l’air comme l’oiseau. Tou, le mouvement sur la terre avec les jambes. Une danse pour la déesse Shen Nü (神女). Comment se transformer pour rejoindre sa lumière, lui offrir tout son être ?
J’aspire à un monde plus respectueux et reconnaissant de la féminité, et la réceptivité. J’espère que ma danse aide à reconnaître et se donner dans toutes ces facettes, du réel à l’irréel, au grand et petit vide de l’existence, de l’univers. C’est une prière du corps, de l’esprit, du cœur, un souffle en mouvement, par elle et pour elle [la déesse].
Le Shen Nü Butō est développé à partir du Butoh fondé par Tatsumi Hijikata et Kazuo Ohno au Japon à la fin des années 50. Le Shen Nü Butō recherche la danse à travers différents médiums. Le corps, la voix, la calligraphie, les mots … Dans cette manière de danser le lien à l’origine, à la naissance est fondamental.
Les thèmes sont essentiellement ceux de la nature, du rêve, du merveilleux et de la non-existence. L’homme s’unit au cosmos, c’est une danse proche du zen, de l’animisme et une prière à rejoindre l’âme divine, première.
Le corps est vu comme un médium à explorer, à sensibiliser. Vecteur de savoir et lié à tous les éléments de l’univers. Cette danse pose aussi la question de l’esthétique de la danse aujourd’hui et de la notion d’Être au monde. Le corps, la calligraphie, le chant ou les mots se donnent plus à sentir qu’à voir, comprendre ou entendre comme une expérience intérieur où microcosme et macrocosme s’entremêlent, une respiration ou vision en flottement d’harmonie et d’équilibre en transformation.
Dans mon parcours de recherche de Butō, il m’est apparu différents éléments importants qui donnent une singularité particulière au Butō :
L’approche Butō est fondamentalement avant-gardiste car l’expérimentation, la recherche en dialogue avec soi-même prévaut à la technique ou la théorie. La technique ou théorie (présupposé) étant à déconstruire pour laisser la place au vrai, c’est-à dire l’expérience pur et authentique du mouvement et de la danse. L’ouverture, la perte de soi tout en faisant tomber les tabous est une clé de la recherche.
Le processus est long et sans fin, il implique son être physique, psychologique, métaphysique, sa capacité d’imagination, de dépassement de soi et un désir de devenir l’autre « soi-même ». Tatsumi Hijikata et Kazuo Ohno, fondateurs de la danse butō ont en cela développé leurs danses personnelles dans une direction, un style propre à leurs histoires et mémoires individuelles, l’histoire de leur temps et ces problématiques mais surtout, leurs nécessités personnelles et très profondes (jusqu’aux ténèbres) du corps et du coeur. En cela j’y vois une danse de l’âme, une libération de l’âme, un rituel dansé symboliquement proche de celui de la déesse Ame-no-uzume, danseuse qui ramena Amaterasu au monde, la déesse du soleil, et par la même la lumière.